Ils ont moins de 50 ans, Marchionne les avait lancés et laissés libres de se tromper, ils ont imaginé une voiture gagnante sous la direction de Binotto. Et derrière ces arrêts aux stands record se cache le travail de Mekies
Sergio Marchionne en assemblée générale les avait définis comme « quatre rasés », arguant sans crainte qu’après avoir viré Ferrari (entendu comme une écurie de Formule 1), il avait confié à ces garçons italiens la barre de l’écurie. « Ce ne sont pas des superstars allemandes ou britanniques, mais la voiture est là. » C’était l’époque de l’organisation horizontale d’un groupe de travail qui aurait balayé, selon le président du Cavallino d’alors, la peur de se tromper, véritable frein à la créativité. Marchionne n’est plus là ainsi que l’organisation horizontale, remplacée par une organisation plus descendante et traditionnelle dirigée par Mattia Binotto. Mais les quatre imberbes, dont le technicien suisse-reggiano, né en 1969, est membre de droit, sont toujours là. Comme l’esprit qui les accompagne : l’envie (ou plutôt le besoin) d’oser, d’explorer toujours de nouveaux chemins ou de retrouver ceux abandonnés. Mais si la Ferrari d’Enrico Gualtieri, Enrico Cardile, Fabio Montecchi, David Sanchez et Laurent Mekies se remet à faire Ferrari c’est aussi parce que, alors que Red Bull et Mercedes se battaient jusqu’au dernier mètre du dernier GP pour le titre 2021, ces les techniciens ont pris le temps d’expérimenter. Et de pouvoir s’appuyer sur les conseils et l’expérience de Rory Byrne, le concepteur des Ferrari qui a dominé avec Michael Schumacher à l’aube du nouveau millénaire. Pour des raisons personnelles, le Sud-Africain, âgé de 78 ans, est l’un des rares encore en activité à avoir eu quelque chose à voir avec l’effet de sol, à l’époque de Toleman. C’est la seule façon d’expliquer le saut impressionnant de la sixième place décourageante du classement des constructeurs 2020 au leadership actuel du championnat du monde.
projet parfait
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Le F1-75 vu à l’œuvre ce week-end à Bahreïn frôle la perfection : facile à conduire (du moins pour Leclerc), rapide dans toutes les conditions, équipé d’un groupe motopropulseur puissant et efficace, respectueux de tous les pneus. Prenons les côtés, qui ont tapé dans l’œil depuis la présentation : derrière, c’est la vision de David Sanchez, français comme Renault où il a grandi, contribuant à l’histoire mondiale remportée par Fernando Alonso en 2005, le premier en tant que constructeur tout court. après les échecs des temps de Prost et d’Arnoux. « L’appui aérodynamique doit être constant de manière à permettre aux pilotes d’avoir toujours un maximum de confiance dans la voiture », est le mantra du chef du véhicule. Personnage mesuré et posé, chez Ferrari depuis 2012 dans des rôles croissants, il a façonné un groupe de travail où chacun sait où mettre la main et quoi faire. Une mécanique bien huilée. « Nous avons apporté de la lumière aux coins sombres que nous avions », est l’image avec laquelle Enrico Cardile (né en 1975) d’Arezzo a présenté la F1-75. Diplômé en ingénierie aérospatiale à Pise, il a rejoint Ferrari en 2005 et parmi les projets les plus réussis sur lesquels il a travaillé figurent les 458 et 488 Gt3. Il a rejoint la Direction Sportive en 2016, et est passé pas à pas de responsable de l’aérodynamique à responsable de la zone châssis. A ce titre, il impose un style de travail à la fois méthodique mais ouvert d’esprit, comme l’a expressément demandé Binotto. « Nous avons travaillé dans de nombreuses directions – a expliqué le technicien toscan, amateur de bon vin, passionné de voyages et de motos et de voitures aux performances sportives – même dans celles que nous n’avions pas battues ces dernières années ».
châssis et aérodynamique
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Châssis et aérodynamisme mais aussi suspensions, un autre secteur qui avec l’avènement d’une voiture plus rigide grâce à l’utilisation de pneus surbaissés s’avère décisif pour les performances. Face à un changement réglementaire similaire, pour Fabio Montecchi – 44 ans, de Mantoue de San Benedetto Po, en rouge depuis 2003, responsable du projet automobile – le secret est « de laisser plus de temps à la phase de réglage, décortiquant la réglementation pour trouver toutes les possibilités de gagner en performance, avec des études, des simulations et des bancs d’essai ». La créativité et le talent sont son credo et la liberté maximale accordée aux collaborateurs « afin qu’ils puissent ressentir l’émotion de participer à cette révolution réglementaire ».
moteurs
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Mais ce qui a impressionné les rivaux et les spectateurs dimanche, c’est la suprématie du groupe motopropulseur avec 5 unités dans le top dix montées sur trois voitures différentes. Et ici, le mérite revient au groupe dirigé par Enrico Gualtieri, héritier d’une tradition d’ingénieurs Ferrari ancrés dans la région. Gualtieri est originaire de Modène, tout comme Mauro Forghieri, un monument de Ferrari et Paolo Martinelli, responsable des dix et huit cylindres de Schumacher. Ses hommes et lui ont réalisé le double miracle de rendre efficace l’hybride avancé arrivé tôt lors des dernières courses de la saison dernière et de récupérer la différence de 25 chevaux avec Mercedes et Honda en révisant et en renouvelant en partie le turbo et le moteur, en concevant des unités de puissance dont les dimensions étaient compatibles avec les souhaits du duo Cardile-Sanchez. « Nous avons osé plus, bien conscients que ces moteurs devront ensuite durer jusqu’en 2026 », a déclaré l’entraîneur, également né en 1975 qui était un footballeur prometteur dans son enfance. Laurent Mekies, né en 1977, français de Tours, moustache et barbiche en tant que mousquetaire, ingénieur en mécanique, bras droit et directeur sportif de Binotto, doit aussi s’ajouter à la bande des barbus, un parcours entre Flèches, Minardi (il était à Faenza 12 ans) et Fia : il connaît tous les plis de la réglementation et en tant que chef des opérations de piste dépendent de lui ces arrêts aux stands parfaits qui ont permis à Leclerc de sortir de la voie des stands de Sakhir toujours devant Verstappen.